Présentation de l'étude
L'étude internationale PIRLS (Progress in International Reading Literacy Study) pilotée par l'IEA (International Association for the Evaluation of Educational Achievement) mesure les performances en lecture des élèves à la fin de leur quatrième année de scolarité obligatoire (CM1 pour la France). Depuis 2001, elle a lieu tous les cinq ans dans les pays de l'OCDE qui le souhaitent.
Cette année, l'enquête PIRLS a eu lieu en mars 2016 et a concerné des élèves qui sont aujourd'hui en 6e.
Les tests sont composés de deux épreuves de 40 minutes :
- une première épreuve de questions sur un texte narratif
- une seconde épreuve de questions sur un texte informatif.
Quatre compétences sont définies et hiérarchisées selon leur degré de complexité :
- prélever des informations explicites
- inférer directement (L'inférence consiste à connaître l'existence d'une chose qu'on ne perçoit pas directement mais qui se déduit d'indices perceptibles.)
- interpréter idées et informations
- apprécier le contenu, la langue et les éléments textuels.
Des résultats préoccupants
> Baisse en valeur absolue : avec un résultat de 511 points, contre 520 en 2011, les élèves français sont désormais nettement distancés par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE (541) et à la moyenne des pays de l'Union européenne (540) qui ont participé à PIRLS.
> Baisse par rapport aux autres pays :
- depuis 2001, le score de la France a baissé de 14 points quand le score moyen des vingt-quatre pays européens qui ont participé à PIRLS a progressé de 6 points.
- Aujourd'hui, la France se situe à l'antépénultième place des vingt-quatre pays de l'Union européenne qui ont participé à l'enquête.
> Baisse de tous les déciles de lecteurs : si en 2001, 7 % des élèves français arrivaient à atteindre un ni¬veau avancé, ils ne sont plus que 4 % en 2016. C'est trois fois moins que dans les autres pays européens.
> On note une accélération de la baisse des résultats des élèves français : en dix ans, entre 2001 et 2011, les élèves français ont perdu 5 points tandis qu'entre 2011 et 2016, soit cinq années, ils ont perdu 9 points.
> Cette année, l'échantillonnage n'a pas permis de distinguer les résultats entre les élèves scolarisés en éducation prioritaire et ceux qui ne l'étaient pas. En 2011, l'écart était net avec pour les premiers un résultat de 480 et pour les seconds un résultat de 523. Les premiers gagnaient 3 points par rapport à 2001 et les seconds perdaient 10 points sur la même période.
Cette étude n'est pas la première à mettre en exergue la baisse préoccupante des résultats des élèves français en matière de maîtrise de la langue. Trois enseignements principaux peuvent être tirés de cette étude et de celles qui l'ont précédée :
- les automatismes de langue ne sont pas assez développés chez les élèves (décodage, orthographe, règles de grammaire et de conjugaison). Ils sont pourtant la condition sine qua non pour la compréhen¬sion de textes longs comme ceux qui sont proposés dans PIRLS (Source : Liliane Sprenger-Charolles, Les premiers apprentissages de la lecture et de l'écriture en français)
- leur capacité à s'approprier et à accéder au sens implicite d'un texte long est beaucoup trop faible
- les élèves les plus fragiles socialement sont particulièrement exposés aux difficultés de lecture. La langue est la première des inégalités.
Pourtant, la durée annuelle consacrée à l'enseignement de la langue est considérée en France comme l'une des plus importantes parmi les pays de l'OCDE (selon l'étude PIRLS 2016 : 288 heures annuelles d'ensei¬gnement en France pour 236 heures en moyenne dans les autres pays européens).
Si l'on considère le " temps d'engagement" des élèves, les durées d'apprentissage sont bien plus faibles. Le "temps d'engagement", c'est le temps que l'élève passe sur une tâche à l'exclusion du temps consacré à la gestion de la classe et à la vie scolaire et du temps d'inattention de l'élève. (Source : Bruno Suchaut, Alice Bougnères et Adrien Bouguen, 7 minutes pour apprendre à lire : à la recherche du temps perdu.)
Il est donc urgent de continuer à soutenir les élèves les plus fragiles et de promouvoir une pédagogie explicite, progressive et structurée fondée sur l'expérience, la recherche et la comparaison internationale pour permettre aux élèves d'accéder à une pleine maîtrise du français, principe de tous les apprentissages.
Une réforme structurelle : le dédoublement des classes en CP et CE1 dans l'éducation prioritaire
Dès le mois de mai 2017, un objectif clair a été fixé par le ministre de l'Éducation nationale : la maîtrise des savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter, respecter autrui) par tous les élèves à la fin du primaire.
Cela suppose d'abord d'apporter un soutien renforcé aux plus fragiles dans les premières années de la scolarité obligatoire.
(Sources : Bressoux, P., & Lima, L. (2011). "La place de l'évaluation dans les politiques éducatives : le cas de la taille des classes à l'école primaire en France." Raisons éducatives (numéro dirigé par G. Felouzis, & S. Hanhart (Eds.),"Gouverner l'éducation par les nombres ?" Usages, débats, controverses, 15, 99-123.)
> À la rentrée 2017, 2 200 classes de CP en Rep + ont été dédoublées.
> À la rentrée 2018, les classes de CP en Rep seront dédoublées ainsi que les CE1 en Rep +.
> À la rentrée 2019, tous les CP et les CE1 en réseau prioritaire seront dédoublés.
Cette augmentation du taux d'encadrement permet de consacrer davantage de temps à chaque élève au moment où il commence l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, tremplin indispensable vers la réussite.
Un volontarisme pédagogique pour tous les élèves
Cette dynamique est la pointe avancée d'une politique pédagogique qui bénéficie à tous les élèves de l'école primaire.
> Mise en place d'un Conseil scientifique présidé par M. Stanislas Dehaene, professeur au Collège de France.
> Désignation d'une nouvelle présidente du Conseil supérieur des programmes (CSP), Mme Souâd Ayada, inspectrice générale de l'éducation nationale.
> Réflexion grâce aux conférences de consensus du Conseil national d'évaluation du système scolaire présidé par Mme Nathalie Mons.
- En mars 2016 : Lire, comprendre, apprendre. Comment soutenir le développement des compétences en lecture ?
- En mars 2018, conférence de consensus sur la production d'écrits par les élèves.
> Évaluations des élèves conçues par le Conseil scientifique. Elles sont des leviers essentiels de progrès pour les élèves. Elles permettent aux professeurs d'avoir une idée claire des compétences de leurs élèves comme de leurs éventuelles difficultés pour ajuster les enseignements au plus près de leurs besoins.Ces évaluations seront légères, faciles à faire passer et à analyser par les professeurs.
- Rentrée 2017 : évaluation en début de CP et de 6e
- Rentrée 2018 :
- évaluation en début de CP (" repères pour le CP")
- évaluation au milieu de l'année de CP ("point d'étape CP") ; À titre expérimental ces évaluations seront proposées aux élèves de l'éducation prioritaire en janvier, février 2018
- évaluation en début de CE1 ("repères pour le CE1") et 6e
- Nouvelles épreuves du diplôme national du brevet. En français, la nouvelle épreuve porte notamment sur la grammaire de phrase, la dictée, la compréhension d'un texte et la rédaction argumentative ou d'imagination.
> Progressivité et clarification des programmes
- Le Conseil supérieur des programmes analyse les programmes et propose des ajustements néces¬saires au regard de l'objectif de maîtrise des savoirs fondamentaux par tous les élèves
- Début 2018, des progressions annuelles seront mises à disposition des professeurs pour les aider à mieux accompagner les élèves tout au long des différents cycles (le cycle 2 - CP, CE1, CE2 ; le cycle 3 - CM1, CM2 et 6e ; le cycle 4 - 5e, 4e et 3e). La cohérence des cycles est conservée, tout en précisant ce qui doit être acquis annuellement.
> La maternelle, "école du langage"
- Accéder à une lecture fluide se prépare très en amont, dès l'école maternelle, qui doit devenir plus encore qu'aujourd'hui une "école du langage", notamment pour les élèves issus des milieux les plus défavorisés. Le travail régulier sur le vocabulaire, la découverte du principe alphabétique, l'écoute, la compréhension de textes lus par l'adulte et la manipulation de livres développent l'intérêt et le plaisir de l'enfant pour la lecture.
- Une conférence sur la maternelle sera organisée en mars pour présenter les nouvelles ressources mises à la disposition des professeurs.
- Travaux en cours avec le ministère de la Fonction publique et l'Association des maires de France (AMF) sur les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem).
> Publication d'une série de documents et d'outils pédagogiques pour favoriser la maîtrise de la langue à l'école et au collège.
- En cette fin d'année 2017
- Recommandations sur la pratique quotidienne de la lecture à l'école élémentaire et au collège afin d'aider les professeurs à faire travailler les élèves sur les compétences de compréhension en lecture. Il sera, par exemple, recommandé de pratiquer la lecture à haute voix, d'entraîner les élèves à lire ou à réciter un texte littéraire devant un auditoire, de ménager des temps de lecture silen¬cieuse significatifs en classe, de favoriser des lectures longues et diversifiées, de varier la nature des textes. L'enjeu est de transmettre le goût de la lecture ainsi qu'une culture littéraire.
- Recommandations sur l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe. Pour assurer le pro-grès des élèves, l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe a vocation à être quotidien et selon des progressions claires et explicites. Dans ce cadre, et dans le prolongement des instructions données à l'occasion de la publication des programmes à la rentrée 2016, la dictée doit être quotidienne à l'école élémentaire.
- Un état de la recherche sur l'apprentissage de la lecture et de l'écriture.
- Des recommandations du Conseil scientifique pour aider les professeurs à bien choisir leurs manuels.
> Initiatives en faveur du livre et de la lecture
- Renouvellement de l'opération Un livre pour les vacances qui sera distribué cette année à 800 000 élèves de CM2.
- Soutien aux associations qui développent la pratique et le goût de la lecture.Réflexion sur les bibliothèques scolaires. Un état des lieux des bibliothèques scolaires va être réalisé pour préciser l'état des fonds et les usages en vigueur. En fonction du diagnostic, des propositions seront formulées pour rééquiper les bibliothèques, développer la lecture sur place et relancer le prêt aux élèves.
- Action interministérielle avec le ministère de la Culture pour proposer une offre culturelle de qualité sur tous les territoires.
> Un plan de formation en lecture pour les professeurs des écoles
- Sur les 18 heures de formation que les professeurs suivent chaque année, 9 heures seront consacrées à l'apprentissage de la lecture.
> Une lettre du ministre aux professeurs précisera l'esprit et les différents aspects de cette mobilisation pédagogique.
Une réponse d'urgence pour les élèves de l'école élémentaire et du collège
Pour tous les élèves qui n'ont pu bénéficier de tous ces dispositifs, une réponse d'urgence est prévue.
> À l'école élémentaire
- L'heure hebdomadaire d'activités pédagogiques complémentaires (APC) sera désormais spécifiquement consacrée aux activités de lecture et de compréhension.
- Développement des stages de réussite pendant les vacances (Source : Bruneau Suchaut, "Temps disponible et temps nécessaire pour apprendre à lire : le défi des 35 heures").
> Au collège
- Les élèves de 6e dont les évaluations passées au mois de novembre 2017 qui font état d'une maîtrise "insuffisante" et "fragile" en "Lecture et compréhension de l'écrit" suivront deux heures d'accompagnement personnalisé (AP) entièrement dévolues à la compréhension en lecture ( Source : Eduscol).
Agir contre les difficultés en compréhension de l'écrit à la fin du primaire et au début du collège
En 2015, N.K. Scammacca a recensé 67 études publiées entre 1980 et 2011 qui montrent l'efficacité d'un ensemble d'interventions sur les progrès des élèves faibles lecteurs.
Maryse Bianco, Pascal Bressoux, Marina Tual, Marc Gurgand, Suzanne Bellue et Fanny De La Haye expérimentent un tel dispositif. (Source : Les effets bénéfiques d'une telle mesure sur les élèves ont été mesurées par Maryse Bianco, Pascal Bressoux, Marina Tual, Marc Gurgand, Suzanne Bellue et Fanny De La Haye, "Lire et apprendre au collège", mars 2017).
Les séances se déroulent sur les heures d'accompagnement personnalisé et sont menées par des professeurs. Chaque atelier a lieu deux fois par semaine pendant une période de six semaines. Chaque élève bénéficie de trois périodes d'ateliers.
- 12 séances dont l'objectif est l'amélioration du rythme de lecture
- 24 séances dont l'objectif est la construction et l'entraînement des compétences nécessaires à la compréhension écrite.
- Le Contrat de réussite, destiné à prévenir le redoublement, va permettre un accompagnement renforcé des élèves, pour répondre à la difficulté en compréhension de lecture.
- Très en amont du conseil de classe du troisième trimestre, dès que la difficulté est identifiée, un programme spécifique sera établi pour accompagner les élèves.
- À la fin de l'année, si et seulement si toutes les mesures préventives n'ont pas permis à l'élève d'assimiler des connaissances fondamentales pour continuer sa scolarité dans de bonnes conditions, l'École lui donne une seconde chance en lui permettant de refaire une année.
- Cette seconde année n'est pas identique à la précédente. Un accompagnement est mis en place pour aider l'élève à surmonter ses faiblesses.
- L'enjeu est donc la personnalisation des parcours des élèves.
- Devoirs faits permet notamment de revenir sur des faiblesses en compréhension de l'écrit. Dans tous les collèges, toutes les familles qui le souhaitent peuvent demander à ce que leurs enfants suivent Devoirs faits.