« En 1911, le pays connaît une vague de chaleur ainsi qu’une épidémie de diarrhée verte qui touche les très jeunes enfants », détaille l’enseignant. Très vite la canicule touche toutes les strates de la société. « Au total 46 719 personnes meurent pendant cette période de fortes chaleurs », précise Patrick Zylberman. Parmi ces victimes, près de 30 000 bébés de moins d’un an, soit « la moitié des nourrissons décédés pendant l’année 1911 ».
Le symptôme très fréquent est la diarrhée. Attisée par les fortes chaleurs, une épidémie de fièvre aphteuse chez les vaches produisant le lait donné aux bébés a provoqué une grave pénurie de lait, d’où le recours à d’autres aliments inappropriés fragilisant les tout-petits en pleine canicule.
Misère et chaleur
Des chiffres ahurissants qui ont cependant différentes explications selon le professeur d’histoire de la santé : « À l’époque, cette chaleur pollue les eaux des boissons, notamment celle utilisée pour les préparations de biberons, explique-t-il. En 1911, on n’avait pas les produits chimiques ni les installations permettant de conserver et protéger l’eau, qui croupissait avec le temps. La chaleur favorise également l’apparition de mouches, qui est vecteur de bactérie en tout genre. Il faut savoir qu’au début du siècle, il y avait 80 000 animaux de bât comme les chevaux, les ânes et mulets. »
Enfin « la promiscuité des logements et le non-traitement des déchets malgré l’apparition des poubelles » ont favorisé la diffusion de microbes polluant l’eau que tout le monde buvait et utilisait en plus grande quantité que d’habitude pour se rafraîchir.
Pour Patrick Zylberman, la mortalité de la canicule de 1911 n’est pas directement due à la chaleur : « Elle est une cause, c’est certain, mais adjacente. La vraie raison de ce lourd bilan c’est surtout la misère. » En réaction, les pouvoirs publics réagissent aussitôt après l’épisode caniculaire en mettant en place une vaste politique de prévention des risques sanitaires à l’égard des bébés.